Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Médiathèque Paul Valéry

La mort entre ses mains d'Ottessa Moshfegh

Ottessa Moshfegh, traduit de l’anglais (E.U.) par Clément Baude

Éditions Fayard – 2022

Vesta Gul, 72 ans, vit dans une cabane au fond des bois. Veuve depuis peu, elle a vendu la grande maison où elle vivait avec son mari, pour s'installer au bout du monde, telle une ermite. Pas de famille, pas d'amis, pas de téléphone, un chien, Charlie et la radio pour toute compagnie. Une fois par semaine, elle part « en ville » effectuer les courses de première nécessité et passe à la bibliothèque pour se ravitailler.

Un matin, lors de sa promenade quotidienne dans la forêt avec Charlie, elle découvre sur le sol un bout de papier avec un énigmatique message : « Elle s'appelait Magda. Personne ne saura jamais qui l'a tuée. Ce n'est pas moi. Voici son cadavre ». Or Vesta n'aperçoit aucun cadavre ni indice de meurtre. Elle pourrait, elle devrait, appeler la police mais elle ne le fait pas. Elle rentre chez elle, tente de chasser l’inopportune phrase mais c’est plus fort qu’elle, elle y pense et y repense. Bientôt l’intrigue prend toute la place et Vesta d’imaginer le portrait de la victime, le profil du tueur, ses origines. Elle fait appel à son imagination et élabore des hypothèses, envisage un mobile. Bref, en un mot, Vesta enquête sur cet improbable meurtre.

Par fragments, ce qu’elle fut affleure au cours du récit : une femme délicate, un peu perdue, mariée jeune à un universitaire plus âgé, brillant, en apparence un époux dévoué et aimant. Dans la réalité, un pervers narcissique qui ne lui a pas offert la vie belle. Un esprit retors, calculateur et diablement dominateur. Elle n’est pas malheureuse notre Vesta de lui avoir, une fois pour toutes, échappé même si c’est la vie qui s’en est chargée. Pas malheureuse mais tellement seule. Alors, lorsque l’isolement est trop intense, il faut trouver du sens pour ne pas sombrer dans la folie…

Un roman intéressant, quoique troublant, sur les ravages de la solitude et les conséquences inhérentes à ce phénomène dévastateur. Cette thématique n’a inspiré que peu d’auteurs et Ottessa Moshfegh la traite à la fois avec la distance nécessaire et une certaine mansuétude pour l’héroïne. L’auteure, par ailleurs, choisit que certaines questions demeurent de simples conjonctures : ce qui est important, nous souligne-t-elle ainsi, ce sont les conséquences et non de savoir s’il y a bien eu meurtre. Un humour caustique et acerbe pour brosser un portrait de femme qui n’a que survolé sa vie, laissant aux autres le loisir de choisir pour elle, de l’étouffer pour mieux vivre. Vesta comprendra, mais trop tard, que c’est nous qui bâtissons, par nos décisions et nos engagements, notre vie…

 

 

Vous trouverez le roman "La mort entre ses mains" dans les rayons de la médiathèque ou ICI

 

Si le thème vous intéresse, je vous conseille le recueil de nouvelles « Onze histoires de solitude » de Richard Yates, « Le désert des Tartares » de Dino Buzzati, « La horde du contrevent » d’Alain Damiaso ou encore « La route » de Cormac McCarthy ou « Récit d’un naufragé » de Gabriel Garcia Marquez

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article